LEUR ETHIQUE ET LA NOTRE

« Je définis la visée éthique par les trois termes suivant : visée de la vie bonne, avec et pour les autres, dans des institutions justes. » (Paul Ricœur, « Éthique et morale », 1990)

Le 17 mars dernier, lors de la réunion du Conseil d’orientation et de surveillance de la Caisse d’épargne d’Ile-de-France, Patrick Saurin, élu Sud BPCE représentant l’ensemble des salariés a été violemment pris à partie par Didier Patault, Président du directoire, et un membre du COS, élu du Val de Marne, représentant des SLE. Ce dernier s’est dit « bouleversé » après avoir entendu une interview de notre camarade sur Europe 1 et s’est lancé dans une violente diatribe contre lui, l’accusant de « tirer dans le dos de l’entreprise » et « de pas avoir d’éthique » !

Voici les faits à l’origine de l’ire grand-guignolesque du représentant des SLE.

Le 14 mars, Patrick Saurin est intervenu sur Europe 1 dans la matinale de Thomas Sotto (« la question qui fâche » de 7 h 15) consacrée aux dettes des collectivités locales et en particulier aux emprunts toxiques. Notre camarade a été invité par cette radio car il connaît très bien le sujet. Il a travaillé plus de 10 ans comme chargé de clientèle auprès des collectivités publiques. Il est par ailleurs l’auteur d’un livre sur la question (Les prêts toxiques : une affaire d’État. Comment les banques financent les collectivités locales, éditions Demopolis & CADTM, Paris, 2013) et de nombreux articles qui font autorité, en particulier auprès des juristes spécialistes des questions de dette locale (voici le lien pour accéder à certains de ses articles : http://cadtm.org/Patrick- Saurin,1461).

Lors de l’interview, Patrick Saurin, présenté comme salarié de Caisse d’épargne, a souligné la responsabilité essentielle des banques dans la commercialisation des emprunts toxiques et du surcoût qu’ils génèrent pour les contribuables :

1 milliard d’euros par an représentant 40000 emplois cotisations sociales comprises.

Interrogé par Thomas Sotto pour savoir s’il avait lui-même proposé de tels prêts lorsqu’il était chargé de clientèle auprès des collectivités locales, notre camarade a répondu qu’il n’en avait jamais fait souscrire en indiquant que cette attitude l’avait amené à quitter ses fonctions pour un autre service (en avril 2004).

Au cours de son intervention, Patrick Saurin a critiqué le rôle de l’État dans ce dossier et a souligné que de nombreuses collectivités avaient assigné les banques en justice et avaient gagné. Il a évoqué les banques en général. Il n’a pas critiqué les Caisses d’épargne en particulier, ni exposé son cas personnel en faisant état des pressions hiérarchiques subies à l’époque pour qu’il commercialise ces prêts. Voici le lien pour visionner cet entretien sur Europe 1 :

http://www.europe1.fr/MediaCenter/Emissions/ Vous-allez-tout-comprendre/Videos/Les-dettes- des-collectivites-1913809/ 

Lors du COS du 17 mars, les dirigeants ont ajouté l’insulte à l’injure. Dans le même temps où les membres du directoire se faisaient voter par le COS (à l’exception de Patrick Saurin qui a voté contre) de scandaleuses parts variables allant de 115 000 à 316 000 euros, le membre du directoire en charge des finances informait ce même COS du provisionnement d’un montant phénoménal enregistré par la CEIDF en 2013 au titre du risque des… prêts toxiques ! Jugez du peu :

En 2013, les provisions pour risque majeur sur crédits structurés (comprendre « emprunts toxiques ») ont été augmentées de 30 millions d’euros, portant la provision non affectée à 45 millions d’euros ! Pour les seuls prêts « Helvetix » (des emprunts toxiques de la CEIDF dont le taux est fonction de la parité euro/franc suisse), le montant des soultes, c’est-à-dire des indemnités que la CEIDF est susceptible de supporter si elle est condamnée, s’élève à 60,6 millions d’euros, une perte supérieure à la marge totale sur épargne centralisée de 60 millions d’euros reçue en 2013 par la Caisse !

A titre d’exemple, sur un seul prêt toxique, la CEIDF a consenti un abandon de marge de 7,4 millions d’euros. Combien les commerciaux doivent-il réaliser d’ouvertures de comptes de dépôt, de souscriptions de cartes bancaires et de signatures de contrats d’assurance pour compenser ces pertes, conséquence d’une incurie de gestion ?

Alors qu’à l’époque notre camarade aurait dû être écouté lorsqu’il pointait et dénonçait les risques de ces emprunts pudiquement appelés « structurés », il a été stigmatisé, écarté de son service, et certains ont, aujourd’hui, l’outrecuidance de venir lui reprocher d’avoir eu raison trop tôt !

Enfin, mis en cause aussi sur sa probité – Patrick Saurin « serait allé sur Europe 1 dans le seul but de vendre son livre » – notre camarade a rétorqué aux membres du COS que ses droits d’auteur étaient reversés en intégralité au CADTM (Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers-Monde ; http://cadtm.org/Francais), une association internationale qui lutte pour les libertés et les droits humains. Le CADTM se bat notamment au côté des femmes marocaines victimes du micro-crédit et des peuples du Tiers-Monde étranglés par le remboursement des dettes illégitimes. Patrick Saurin a également rappelé aux membres du COS qu’il était le seul parmi eux à ne pas toucher ses jetons de présence puisqu’il les reverse en intégralité à son syndicat Sud BPCE.

Après cette présentation factuelle, nous laissons les salariés des Caisses d’épargne juger :

  Qui a fait preuve d’éthique dans cette affaire ?

  Qui a tiré dans le dos de l’entreprise et de ses salariés ?

  Qui a fait preuve de compétence et de justesse d’analyse dans ce dossier ?

  Qui a respecté la conformité, a fait preuve de probité et de loyauté à l’égard des clients ?

Sud BPCE soutient de manière indéfectible son représentant dans son action légitime pour défendre le droit, l’éthique et les intérêts des clients et des salariés.

Toute pression, menace ou autre entrave à l’encontre de Patrick Saurin et à sa liberté de parole serait considérée comme une attaque contre notre syndicat et ferait l’objet d’une riposte à la hauteur de l’agression. 

Paris, le 26 mars 2014

L’exécutif national : J.Bonnard – G Breuillat – M.Brugnooge – D.Gilot – JL.Kerenflec’h – B.Konieczynski – JL.Pavlic – A.Quesne – P.Saurin